Le bulletin n°9 - mai 2019

Publié le mardi 7 mai 2019 à 12h04

Oisans Solidaire

Bulletin d'information n°9

Mai 2019

On va commencer par le facile et l'agréable et comme ça, le lecteur peut prendre son agenda :

Oisans Solidaire sera à nouveau sur le marché de Bourg-d'Oisans pour partager un café solidaire (appelons-le « Café Sol' », cela évitera les redondances !)
Le samedi 18 mai, à partir de 10h.
C'est une occasion pour mieux faire connaissance, notamment entre adhérents, membres du CA etc...

Mais aussi, il y aura une projection du film « Déplacer les montagnes », de Laeticia Cuvelier et Isabelle Mahenc, au cinéma de Bourg-d'oisans
le samedi 25 mai, à 20h
qui sera précédée et/ou suivie d'un moment de grignoti partagé pour parler ensemble de toute cette thématique.

Pendant plus d’un an, Isabelle Mahenc et Laetitia Cuvelier ont filmé de l’intérieur les rencontres entre les personnes exilées qui arrivent après un long périple et celles et ceux qui les accueillent
entre les montagnes du Briançonnais. Anne, Yves, Fanfan, Max et Alia habitent les vallées du Briançonnais. Les chemins de l’exil ont conduit Ossoul, Abdallah, Ali et Boubacar dans ces montagnes frontière et refuge. Comment se rencontrent-ils ? Quels sont leurs colères, leurs rêves et leurs espoirs ? Comment tentent-ils de déplacer des montagnes ? Dans leurs récits et dans les moments de fraternité qu’ils partagent, s’esquissent des réponses et d’autres interrogations…

https ://reporterre.net/Avant-premiere-du-film-Deplacer-les-montagnes-a-Briancon-Hautes-Alpes

Car cette problématique, on le sait bien, est toujours au cœur d'enjeux nouveaux. Celui du mois de mai sera les élections européennes et la montée des partis populistes, europhobes, et anti-migrants puisqu'il semblerait que tout cela fonctionne un peu ensemble...

On va d'abord donner des nouvelles des demandeurs d'asiles installés à Bourg-d'Oisans et suivis par Oisans Solidaire, avant de les mettre en perspective avec des chiffres et des données européennes.

Il y a de belles et bonnes nouvelles : la naissance d'une petite fille dans la famille Camara. Une petite Mariam, née le 19 mars dernier à Grenoble. Tout s'est bien passé, la maman et l'enfant sont en bonne santé et pour l'instant installées chez d'autres personnes à Grenoble, par commodité pour le suivi du bébé et les nécessaires déplacements administratifs relatifs à leur situation.

Aïcha et sa maman sont toujours à Bourg-d'Oisans. La scolarité d'Aïcha se passe bien, elle progresse très vite et pourra passer en CE1. Il y a toujours des bénévoles pour assurer des transports sur Grenoble (RV à la préfecture etc...) et l'hébergement de la fillette en cas d'absence de la maman. Elles sont au moins dans une sécurité matérielle.Leur situation administrative est cependant plus précaire. Elles ont été déboutées de leur demande d'asile et ont reçu dans un premier temps une Obligation de quitter le territoire et de suivre la procédure Dublin, c'est à dire retourner en Italie pour y redéposer une demande d'asile là-bas. Elles ont donc dû pendant un certain temps pointer à la police à Grenoble une fois par semaine. Cependant, suite à une demande de recours très bien accompagnée par une avocate qui a pu repérer un vice de forme dans la procédure, le juge a révoqué la reconduite immédiate à la frontière.
Elles disposent donc d'une sorte de sursis, mais la procédure n'est pas encore complètement annulée et elles peuvent être à tout moment déplacées par l'OFII (Office Français pour l'immigration et l'intégration).

La demande de Lorenc et Eurolinda a aussi été rejetée, en première instance et en appel. C'est difficile pour eux parce qu'ils viennent d'emménager dans un nouvel appartement à Bourg-d'Oisans, qu'ils peuvent payer dorénavant avec leurs propres deniers parce que Lorenc a trouvé un travail. Mais du coup l'association les soutient aussi moralement : ils ont maintenant la possibilité d'engager les démarches pour demander un titre de séjour et ils rassemblent déjà de nombreuses garanties d'intégration. On garde espoir.

Si des membres de l'association veulent leur rendre visite, ce qui leur fera assurément plaisir, il ne faut pas hésiter à nous demander leur adresse.

Ces deux familles sont prises dans les mêmes difficultés qui touchent des milliers de demandeurs d'asile en France et en Europe.


Entre 2014 et 2018 les pays de l'UE ont rejeté 1,5 million de demandes d'asile, multipliant le nombre de personnes sans statut. Plus de 4,5 millions de demandes ont été enregistrées, dont plus du quart dans la seule Allemagne. 2,1 millions de demandes positives de protection ont été prises et aujourd'hui plus de 878 000 procédures demeurent en cours d'examen.
Les demandes rejetées sont suivies en principe mesures de retour dans le pays ou bien les personnes tentent d'autres voies de régularisation. Une partie d'entre elles se trouve dans les méandres des procédures Dublin : pour ne pas être expulsées, elles tentent leur chance dans un autre pays, en contournant la règle selon laquelle seul l'Etat membre dans lequel elles sont entrées en Europe est responsable de l'examen de leur situation.
En réalité, au terme de 6 à 18 mois d'attente, un migrant peut déposer une demande d'asile dans un autre Etat de l'UE. Ces cohortes de « dublinés » sont devenues le principal problème de la politique migratoire européenne. Et la France est devenue un « pays de rebond » : 1/3 des demandeurs d'asile sont des dublinés en provenance d'un autre pays de l'UE. Cette tendance a peu de chances de s'inverser : ½ million de demandes rejetées en Allemagne l'année depuis 2014. + fort durcissement en Italie ministre de l'intérieur I.Salvini.
Des accords de réadmission existent désormais entre l'UE et 23 pays dont l'Afghanistan, la Guinée et le Banglasdesh. Mais le taux globla de retour effectif est faible : 36% des migrants en situation irrégulière ayant reçu l'ordre de quitter le territoire de l'UE s'y sont effectivement conformés en 2017... et se retrouve en errance.
En France, des associations ont récemment demandé un moratoire sur l'application du règlement de Dublin pour résorber les campements parisiens dans lesquels sont décomptés 3/3 de « dublinés » qui attendent l'expiration du délai de 6 à 18 mois au terme desquels ils pourront déposer une demande d'asile.
« Il faudrait imaginer un autre système de protection. Ces gens ne sont pas si nombreux et méritent un avenir. On les rend dingues et, au final, ils restent, mais ils mettent de plus en plus de temps à s'intégrer ».

Carine Rolland, de Médecins du monde.

« La seule perspective pour les déboutés, c'est de tenir le coup, de réussir à s'intégrer, à scolariser les enfants, à trouver un patron bienveillant pour réussir à convaincre la préfecture au bout de plusieurs années » résume Lise Faron de la Cimade.

D'après un article paru dans Le Monde du mardi 7 mai 2019

On reparle de tout cela ensemble, le samedi 18 et le samedi 25 mai...